Histoire de l'Ordre

Naissance de l’ Institut

C’est aux bords du lac d’Annecy, petite cité du Duché de Savoie et résidence des évêques de Genève en exil, que naît l’Ordre de la Visitation Sainte-Marie. En la fête de la sainte Trinité, le 6 juin 1610, saint François de Sales, évêque de Genève, introduit dans la petite “Maison de la Galerie” sainte Jeanne de Chantal, sa fille spirituelle, accompagnée de Marie-Jacqueline Favre et de Jeanne-Charlotte de Bréchard, auxquelles s’adjoint Anne-Jacqueline Coste.

La pensée que le chemin de la sainteté doit être proposé à toute personne, quel que soit son état de vie, avait guidé saint François de Sales dans la rédaction de son ouvrage le plus célèbre : « L’Introduction à la Vie dévote ». C’est une même audace qui motive la fondation de la Visitation : proposer à toute femme, quelle que soit sa santé ou son âge, une authentique vie religieuse, pour “y vaquer à la perfection du Divin Amour”.

Dès le 1er juillet 1610, notre saint Fondateur voulut que sa petite congrégation s’appelât : la Visitation de Notre-Dame, ou Religieuses de la Visitation Sainte-Marie, nous donnant ainsi pour sainte patronne la Vierge Marie, dans son mystère de la Visitation à sa cousine Élisabeth. Il trouvait dans ce mystère, disait-il, mille particularités spirituelles qui lui donnaient une lumière spéciale de l’esprit qu’il désirait établir dans son Institut.

Dans ces commencements, le Maître des Novices des premières Filles de la Visitation n’est autre que saint François de Sales lui-même, il les instruit des vertus de la vie religieuse telle qu’il l’envisage. Ces enseignements, recueillis par nos premières Sœurs, sont réunis dans le copieux livre des Entretiens Spirituels. Le saint évêque est très exigeant quant à la beauté et dignité de la liturgie, aussi vient-il dans la chapelle écouter ses Filles chanter le petit Office de la Vierge Marie, et corrige ensuite les fautes de prononciation du latin.

 

Réalisation définitive

« Peu à peu, la vie régulière prend forme. Saint François de Sales avait d’abord rédigé une esquisse de nos Constitutions qu’il remit en 1610 entre les mains de notre sainte Mère, Jeanne de Chantal : « Suivez ce chemin, lui dit-il, ma très chère Fille, et le faites suivre à toutes celles que le Ciel a destinées pour suivre vos traces. » Il en écrit une nouvelle version en 1613, et leur donne leur forme définitive en 1618, qui sera imprimée en 1622, avec la Règle de saint Augustin qu’il nous donne comme base.

Il prescrit à ses filles dans le Directoire spirituel : « Que toute la vie et exercices des Religieuses de la Visitation soient pour s’unir à Dieu, pour aider par prières et bon exemples à la réformation de la sainte Église et au salut du prochain ». À l’origine, en la première communauté d’Annecy, les Sœurs effectuaient aussi, pas plus de deux heures par jour, la visite des malades et des pauvres. Cet exercice fut plutôt ajouté pour la dévotion que les premières Religieuses y avaient, que comme fin principale. Le saint évêque de Genève n’a jamais envisagé de fonder une congrégation dans ce but : la Visitation n’a jamais été une ébauche de ce que réalisera plus tard saint Vincent de Paul, il n’a jamais voulu établir en Savoie des Sœurs de la Charité. Les Visitandines ne sont pas fondées pour être des visiteuses, comme leur nom semblerait l’indiquer : elles sont des visitandines, surtout parce qu’elles doivent vivre selon l’esprit d’un mystère évangélique, celui de la Visitation, tout de piété intime, d’humilité et de charité fraternelle. La fin primordiale de son petit Institut, c’est la vie contemplative.

Les Fondateurs reçoivent la confirmation que cette façon de vivre correspond à un réel besoin des âmes par le nombre de vocations qu’attire la nouvelle communauté d’Annecy, si bien que la petite Maison de la Galerie, berceau de l’Ordre, s’avère être bientôt trop étroite. Le 30 octobre 1612, les premières Filles de la Visitation déménagent à l’intérieur de la ville. En 1614, on envisage la construction d’un véritable monastère et d’une chapelle, « une petite églisette bien façonnée », dira saint François de Sales.

En 1616, à l’occasion de la première fondation d’une Visitation en France, à Lyon, les visites de charité évoquées précédemment sont supprimées définitivement au profit d’une absolue clôture monastique, et de l’érection de la congrégation en Ordre religieux le 23 avril 1618, avec la profession des conseils évangéliques (vœux de pauvreté, chasteté, obéissance). Mais le dessein du fondateur demeurait inchangé, ainsi qu’il le confirma à l’Archevêque de Lyon : « donner à Dieu des filles d’oraison et des âmes si intérieures qu’elles soient trouvées dignes de servir sa Majesté infinie et de l’adorer en esprit et en vérité ». Dans le XXXIII° chapitre de nos Constitutions, la mission et l’esprit de notre Ordre sont définies par notre Fondateur : « L’intention que les Sœurs doivent avoir eue en l’élection qu’elles ont faite d’abandonner le monde pour se retirer au monastère est afin de s’unir plus parfaitement à Dieu, mortifiant leurs sens extérieurs, et encore plus leurs passions intérieures, pour rappeler toutes leurs forces au service de l’Époux céleste, par une chasteté toute pure, une pauvreté dépouillée de toutes choses, et par une obéissance établie en une parfaite abnégation de sa propre volonté. Cette Congrégation est fondée spirituellement sur le mont de Calvaire, pour le service de Jésus crucifié. »

Après la fondation de la Visitation de Lyon, ce fut le tour de Moulins d’accueillir des Filles de la Visitation. C’est cette troisième communauté qui fondera en 1630 à Nantes notre monastère, le 39ème de l’Ordre. Entre 1615 et 1640, plus de 100 religieuses de la Visitation d’Annecy sont envoyées fonder de nouvelles maisons de l’Ordre.

Épreuves et espérance

À la mort de notre sainte Mère Jeanne de Chantal, le 13 décembre 1641, il y avait 87 monastères de la Visitation en France. En 1789, on en compte 120 : ils sont tous supprimés à la Révolution. Il ne reste alors qu’une trentaine de monastères répartis entre l’Italie, l’Allemagne, l’Autriche, la Suisse, la Pologne, l’Espagne, le Portugal et le Liban.

En 1808, 19 monastères sont rétablis en France, avec chacun un pensionnat pour l’éducation des filles, comme exigé alors (et pour peu de temps) par le gouvernement. À la fin du XIXème siècle, on atteint le chiffre de 64 monastères de l’Ordre fondés ou refondés, dont Nantes en 1810 ; 24 sont fondés hors d’Europe.

Au début du XXème siècle, l’Espagne fonde au Mexique, mais la persécution en 1916 oblige les Visitandines à revenir en Espagne, où la guerre civile de 1936 fait de nombreux martyrs (dont nos 7 bienheureuses Sœurs martyres du 1er monastère de la Visitation de Madrid). Après les persécutions, des Visitandines espagnoles et mexicaines refondent au Mexique. Les fondations se multiplient rapidement en Amérique Latine. Dans la deuxième moitié du XXème siècle naissent les premières Visitations africaines (Congo, Burundi…), qui ne cessent d’en fonder de nouvelles sur leur continent. Enfin, en ce XXIème siècle auquel nous vivons, notre saint Ordre continue d’essaimer dans de nouveaux pays : on compte déjà une fondation en Corée du Sud et une au Salvador.

Dans la vision qui précéda la fondation de la Visitation Sainte-Marie, saint François de Sales vit, au fond d’une vallée, un arbre dont les branches s’allongeant, passèrent par dessus les montagnes. Il sut alors que l’Ordre nouveau rayonnerait par toute la terre. Aujourd’hui l’Ordre de la Visitation Sainte-Marie compte 153 Monastères sur les 4 continents : la vision prophétique de notre saint Fondateur s’est bel et bien réalisée. 

Le grand arbre de notre saint Ordre a produit pour l’Église et pour le monde de beaux fruits de sainteté : saint François de Sales (proclamé Docteur de l’Église) et sainte Jeanne de Chantal, sainte Marguerite-Marie, nos Bienheureuses Sœurs martyres de Madrid, les vénérables Sœurs Anne-Madeleine Rémuzat, Marie-Marguerite Bogner et Marie de Sales Chappuis. À l’heure qu’il est, de nouveaux procès de béatification sont en cours… les causes de Sœur Françoise-Thérèse Martin (sœur de sainte Thérèse de Lisieux), Mère Maria-Angelica Alvarez Icaza (fondatrice de la Visitation de Mexico), et de Sœur Marie-Marthe Chambon (apôtre de la dévotion aux Saintes Plaies) ont été introduites, et attendent la décision de la sainte Église.

 

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